Association Martiniquaise des Amis des Volcans Verts de la Caraïbe

la biodiversité végétale exceptionnelle de la presqu'ile du sud-ouest J.P. FIARD 04/05/2018

Les prospections botaniques approfondies (mais aussi les prospections faunistiques) menées depuis 15 ans dans la Presqu’île du sud-ouest (et destinées à se poursuivre encore pendant un certain nombre d’années car le sujet est loin d’être épuisé) témoignent de la très haute qualité globale de tout cet espace :

1) très grande qualité paysagère avec une très importante variété de reliefs, de sites, de perspectives, et, puisqu’il s’agit essentiellement de forêts, de paysages de sous-bois, de types de végétation et même de monuments géologiques intra forestiers (quelques zones assez fabuleuses - et méritant d’être aménagées - de sites d’énormes blocs andésitiques et de rillenkarren envahis d’une profusion spectaculaire plantes épilithes.

2) richesse tout à fait exceptionnelle de la flore arborée forestière autochtone qui, selon nos derniers décomptes, comptent environ 220 espèces arborées autochtones ou vraisemblablement autochtones et 10 espèces allochtones ou exotiques pleinement naturalisées. Sur ces 220 espèces arborées autochtones 1 est endémique stricte de Martinique, environ 24 sont endémiques des Petites Antilles dont la Martinique et 33 endémiques des Antilles dans leur ensemble (Grandes Antilles plus Petites Antilles), soit un total de 58 espèces. Un chiffre élevé pour les espèces de la zone mésophile ou sempervirente saisonnière tropicale qui compte, dans les Antilles, beaucoup moins d’endémisme que la zone de montagne entre 500 et 1500 m.

A titre de comparaison la flore arborée hygrophile de basse montagne et de montagne du nord de la Martinique s’élève à environ 190 espèces. La flore arborée indigène de la presqu’île du sud-ouest contient plus d’espèces d’arbres que toute la forêt hygrophile du nord de la Martinique et presque 3 fois plus d’espèces arborées indigènes que l’ensemble du territoire métropolitain français (74 selon un site du Ministère de l’Agriculture) pour un territoire 500 fois plus petit.

3) très grandes possibilités de randonnées, largement sous-exploitées et surtout sous organisées, de plus et sans vue systémique et d’ensemble des itinéraires et combinaisons d’itinéraires possibles. Ajoutons aussi qu’au regard de ce qui est fait ailleurs, en particulier à la Réunion, la signalétique et les possibilités d’hébergement in situ, c’est-à-dire en plein milieu naturel (le vrai randonneur ne randonne pas pour retrouver chaque soir la pollution urbaine, le bruit et le stress) sont extrêmement déficientes. C’est là un ensemble de faits très regrettables car la diversité des milieux et la puissance de la végétation et de la forêt tropicale sont très supérieurs en Martinique.

4) enfin et surtout, car ce n’est pas le moindre des intérêts de la presqu’île du sud ouest, du moins du point de vue scientifique, celle-ci recèle aujourd’hui encore des possibilités de découvertes importantes et stimulantes dans de nombreux domaines. En botanique des espèces potentiellement nouvelles pour la Martinique et peut-être même pour la planète ont été découvertes au cours des dernières années de prospections : 2 espèces nouvelles potentielles pour les arbres forestiers selon l’auteur : 1 Clusia sp. et 1 Micropholis ? sp. ; 4 Orchidées nouvelles potentielles selon Courtinard (2015) : Campylocentrum sp. n° 1, Campylocentrum sp. n°2, Malaxis sp. n°1 et Malaxis sp. n°2 . Dans le domaine des Champignons supérieurs la forêt mésophile martiniquaise est exceptionnellement riche en espèces et la presqu’île recèle par conséquent un très important potentiel à ce jour totalement sous étudié. Enfin, l’entomofaune de cette région, selon nos amis spécialistes, est particulièrement intéressante, même dans des zones aussi arides que le Cap Salomon.

Clusia sp

Espèce nouvelle possible  J.P. Fiard

Malaxis sp1

Espèce nouvelle possible  P. Courtinard

Campylocentrum sp1

Espèce nouvelle possible  P. Courtinard

Campylocentrum sp2

Espèce nouvelle possible  P. Courtinard


quelques espèces en détail


Malilkara  bidentata


(Balata)  Sapotaceae

Ecorce marron foncé et fissurée longitudinalement sur les vieux sujets. Les feuilles sèches tombées au sol ont une belle couleur cuivrée. Cette espèce est rare parce qu’elle a été beaucoup exploitée pour son bois.Distribution : Antigua, Barbados, Dominique, Guadeloupe, Martinique, Ste. Lucie, Grandes Antilles, Îles Vierges, Trinidad, Amérique du Sud.


Myrcianthes fragrans


(Bois pelé) Myrtaceae

Appelé Bois pelé en raison de la présence de grandes plaques d’écorce se détachant et s’accumulant à la base de l’arbre ou encore appelé Bois d’inde bâtard car ses feuilles ressemblent à celles du bois d’inde.

Distribution : St. Martin, St. Barthélemy, Antigua, Saba, St. Kitts, Montserrat, Guadeloupe, Marie Galante, Martinique, Ste. Lucie, Grenade, Amérique du Nord, Amérique Centrale, Amérique du Sud.


Hymenaea courbaril


(Koubawi. Coubaril.) Fabaceae-Caesalpinioideae

Feuilles caduques qui possèdent deux folioles  disposés comme l’empreinte  d’une patte de boeuf. Gousses épaisses ne s’ouvrant pas à maturité, la pulpe charnue est comestible et légèrement sucrée.

Distribution : St. Martin, St. Barthélemy, Antigua, Saba, St. Eustatius, Montserrat, Guadeloupe, La Désirade, Marie Galante, Les Saintes, Dominique, Martinique, Ste. Lucie, St. Vincent, Les Grenadines, Grenade, Grandes  Antilles, Amérique centrale, Amérique du sud.


Syagrus amara 


Ce palmier à stipe élancé et sans épines peut atteindre jusqu’à 20 m de haut et dépasser même le toit de la forêt. Les fruits au sol ressemblent à des petits cocos de couleur jaune orangé vif.

Distribution : Montserrat, Guadeloupe, Dominique, Martinique, Ste. Lucie (endémique des Petites Antilles)


un ensemble de douze znieff regroupées en six sous-unités

ZNIEFF : Zone Naturelle d'Intérêt Écologique  Faunistique et Floristique

La presqu’île du sud ouest de la Martinique forme, à l’ouest de la région de Rivière-Salée et sur une longueur de 15 km, une avancée complexe d’anciens volcans et de mornes élevés, globalement orientés selon un axe est ouest. Culminant entre 400 et 500 m d’altitude pour la plupart d’entre eux, ils présentent, dans leur région sommitale, des conditions bioclimatiques et des unités végétales sensiblement différentes de celles qui règnent sur leur partie littorale chaude et sèche.

De ces reliefs extrêmement variés, caractérisés souvent par des pentes fortement déclives et quelquefois des falaises, par de nombreuses petites vallées et ravines confinées, naît une pluralité de microclimats et de micro milieux qui s’inscrivent eux-mêmes dans un climat général de plus en plus sec au fur et à mesure qu’on s’approche du littoral très aride du cap Salomon. A tout cela s’ajoute le caractère, fortement inégal selon les secteurs, de l’impact de l’activité humaine ancienne et actuelle sur la végétation. En effet, en dépit d’une intense activité agricole passée, un nombre non négligeable de secteurs d’accès très difficile, ou bien trop secs ou trop rocheux pour permettre des cultures rentables, ont localement échappé aux défrichements intensifs. Depuis la forte déprise agricole survenue dans la presqu’île dès les années 1950 ces îlots forestiers relictuels ont été le point de départ d’une reforestation générale de cette dernière.

Des conditions générales d’ordre topographique, bioclimatique et historique évoquées ci-dessus, naît un milieu complexe, diversifié et contrasté formé d’un nombre important d’unités végétales et écologiques distinctes. Grâce à un intense travail de prospection forestière et botanique commencé dans les années 1989 par l’équipe ZNIEFF d’alors et complété ultérieurement au cours des 15 dernières années écoulées par l’auteur de ces lignes et ses accompagnateurs (plus de 30 aires de relevés réalisés sur les deux périodes), l’aire forestière de la presqu’île compte à ce jour 9 ZNIEFF achevées et plusieurs fois revisitées.


A ces 9 ZNIEFF réalisées il faut ajouter 3 ZNIEFF projetées et jamais commencées, mais essentielles, car elles sont les plus riches en espèces caractéristiques de l’ancien climat :

  • Morne d’Orange à Thomas
  • Plateau de l’Atalante et versants supérieurs du Morne La Plaine
  • Partie supérieure de la rivière de La Pagerie.

L’ensemble de ces ZNIEFF est actuellement globalement regroupé à l’intérieur du périmètre de la future APB de la presqu’île du sud ouest en cours de finalisation par les services de la DEAL.

Plusieurs de ces 12 ZNIEFF, bien que possédant chacune son originalité et son intérêt propres, présentent des conditions bioclimatiques et topographiques proches ainsi qu’un passé agricole plus ou moins similaire, et peuvent donc être ramenées à une même sous-unité écologique et descriptive. En procédant de cette manière il est possible de délimiter 6 sous-unités topographiques et écologiques de la partie boisée de la presqu’île, et de rendre ainsi plus claire et plus lisible son analyse biogéographique et paysagère sans nuire en rien à la précision de la description et de l’analyse.


les sous-unités topographiques et écologiques de la partie boisée

listes des espèces végétales rencontrées dans les massifs boisés